Coldcut est enfin de retour et aime les chiffres ronds. Voilà en effet trente ans que le duo trip hop électro jazz fut créé par Jonathan More et Matt Black. Et voilà dix ans que nous n’avions pas pu apprécier leurs compositions originales. La convergence des planètes du système solaire n’est jamais bien loin lorsqu’il s’agit de marquer ainsi les esprits dans cette perspective d’expropriation de nos égos. La place est désormais libre pour accueillir un paroxysme de délectation sonore, dans la symbiose des nouveaux univers déjantés et pénétrants de Coldcut. Meet them or again à travers le nouvel EP Only heaven.
Creative ! Encore et toujours. Et cela ne surprendra personne. En tous les cas, pas ceux déjà addicts aux manipulations et aux manigances de Jonathan More et de Matt Black, aka Coldcut, y compris donc dans ce titre intégrant les cinq plages d’un EP minimaliste et pourtant riche de sensations atmosphériques. Only heaven, rien que ça. Une promesse ? Sans doute. Pourtant, on cerne mieux aujourd’hui la double trajectoire prise une fois de plus par les maîtres de sample de Coldcut, dans cet objet renfermant les mariages les plus improbables, et néanmoins les plus prolifiques.
Certains jeunots devraient parfois s’inspirer un peu plus de leurs aïeux, bien plus à la pointe que bon nombre de nouvelles formations « revintagées » et dont les sons résonnent… dans le vide. Say kids what time is it – au juste – ? Essayez voir de Boot the system, puis de Walk a mile in THEIR shoes. Il ne faut surtout pas réveiller le Man in a garage qui dort. En fait, il fait semblant. Mais ça, c’est fantastique. Même si pour la descendance et ses certitudes, c’est cataclysmique !
Coldcut : des vieux enfants
Il ne s’agit pas de manquer de respect aux personnes âgées. Meuh non ! Il s’agit de dire que la recette de la réinvention ne peut se passer de l’expérience comme elle ne peut ignorer la dynamique de la jeunesse parfois naïve. Il s’agit de dire qu’un enfant peut aussi avoir plus de la cinquantaine.
Cela vous fait sourire ? Le titre album Only heaven en collaboration avec Roots Manuva vous fera sans doute changer d’avis. Si toutefois vous avez réussi à cerner précisément l’intention originelle de Coldcut. Une coupe froide dans la musique et dans les mots. Une partition de vie tailladée, des tranches de souvenirs dans un pré, les cicatrices d’un rafistolage à l’ancienne au milieu des bombes et des cris, un baiser qui interrompt toutes les paroles inutiles.
Des rêves libres
Et ce, depuis la naissance l’autre bébé de Jonathan More et Matt Black, leur label Ninja Tune. Et ce, à travers tous ces artistes révélant la puissance de leur flair et de leur engagement au sein de cette maison reconnue depuis les années 90 comme l’un des repères les plus en vue à Londres de la musique indépendante. Et ce même, depuis 2013, lorsque D’autre rime avec la poésie viscérale d’un certain Arthur Rimbaud.
Pas besoin d’en faire des caisses : il suffit de prendre le temps d’écouter. De s’inspirer. D’expirer. D’apprendre. Et pourquoi pas, d’embarquer sur les Dreamboats made by Coldcut, avec l’espoir que les vents du large les ramènent rapidement sur nos côtes, histoire de ne pas nous laisser orphelins de leur imaginaire trop longtemps.
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