Sylvain Fesson revient le 7 mai prochain avec un nouvel EP intitulé L’Amour plus fort. Avec un grand A, évidemment. Avec en tête le partage d’une intimité restant malgré tout secrète. Par sa plume, l’expression minimaliste de sentiments tendres et de luttes intérieures. À travers son organe, cette ambition de transmettre sans chanter les mots jetés sur le papier.
Sylvain Fesson est un journaliste repenti. Loin des salles de rédaction désormais, il a décidé il y a quelques années de dédier son existence au sens que son chemin permit de lui trouver. Un sens dont Sylvain Fesson garderait la maîtrise et dont il explorerait les moindres recoins. Pendant plus de dix ans donc, il écrivit pour les autres. Les gros titres, mais aussi son webzine Parlhot qui, à l’instar de Skriber, offrait une autre façon d’appréhender l’artiste. Une autre manière de le déshabiller, de parler tout simplement de lui. À 33 balais, il tourne la page et (re)vient à la poésie. Des poèmes « rock » qu’il diffuse sur son site officiel portant sa nouvelle marque : celle d’un homme qui peint avec ses mots les anecdotes de son quotidien, ses nuits torturées, ses moments d’abandon assumés. En parallèle, il devient éducateur spécialisé.
Après la sortie en 2014 de sa première production, Sonique-moi, marquée par l’empreinte d’un univers conjuguant l’urgence de vivre à la quiétude des bras de Violaine qu’il regrette, Sylvain Fesson sort successivement Amy (I) puis Amy (II) en 2016. Sur les compositions originales de Sandro Mariotti puis de Pierre-Alexandre Voye et Christophe Orsillia, il initiait ainsi une interprétation axant essentiellement son intensité sur les mots, choisis dans l’ombre d’une langue dogmatique qu’il tente ainsi de remodeler. Cette perspective se retrouve dans son nouvel EP, L’Amour plus fort, à paraître le 7 mai, pour lequel il collabore à nouveau avec Arthur Devreux.
Sylvain Fesson : le parti pris en était-il un ?
Sylvain Fesson ne semble donc pas chanter. Dans L’Amour plus fort, il opte une fois de plus pour un ressenti du mot, qui pourra en bousculer certains. Pourtant, force est de constater que le message passe. Il serpente et s’enroule, rampant du sol à notre cou. Il imprime sa caresse en laissant la froideur du reptile au placard, comme c’est le cas dans le titre La Forêt.
Les points chauds corporels se réveillent tels des volcans jusque-là en sommeil. Dans les atmosphères cinématographiques créées par Arthur Devreux, Sylvain Fesson se libère de poids qui ne sauraient être des fatalités. Son phrasé et son éloquence sereine insinuent un chant en filigrane, celui que l’auditeur peut imaginer de mille formes : Six o’clock à sa montre, une infinité de temps pour vous y égarer.
L’Amour plus fort que le sort
« L’Amour est plus fort que la mort […] Entre la vie et la mort, entre ! Entre ! » : le titre EP en première plage semble faire écho à un souvenir. Il appelle aussi un espoir, sans doute celui de le vivre encore. L’Amour plus fort ne nie pas la réalité : il la reconfigure. Dans les murmures de Sylvain Fesson transgressant l’outre-tombe, l’œil de celui qui ne transige pas, qui accompagne, qui porte, qui étreint.
On devine ainsi sa raison de vivre, pour l’autre qui cohabite avec lui dans son propre esprit. Pour l’autre avec 50 ans de plus, de l’autre côté de votre rive. Pour l’autre dans cette rue prédestinée et pour Les Oiseaux qui mourront un jour. De là à parler de fin en soi, il n’y a qu’un pas. Dans l’immuable cycle de la nature qui survit à tous, l’éphémère humain se cramponne aux ailes des volatiles, « à ses délires futiles, à son style pacotille » comme le chantait MC Solaar. De là à cesser de rêver à l’immortalité de l’âme, Sylvain Fesson a fait son choix, et pique à son tour les cœurs pour les habiter.
Sylvain Fesson : Facebook | Photos : Patricia Alvez (header)