Premier film réalisé en 1999 par le désormais célèbre Sam Mendès (Jarhead, Les noces rebelles, Skyfall…), American beauty est un film devenu culte de par ses contours irrésistiblement réalistes. Il dépeint la rage sauvage de l’être et sa désespérance toute poétique, poursuivi par son ombre s’amusant de l’ironie de son sort et de la futilité de ses choix.
Peut-on expliquer la beauté du monde ? Peut-on expliquer notre incapacité à la voir, à nous laisser émouvoir par elle ?
Lester Burnham (Kevin Spacey) travaille dans un open space au sein d’une entreprise le considérant comme un numéro. Il partage sa vie avec sa femme Carolyn (Annette Bening), agent immobilier impassible cultivant les roses de son jardin tout autant que sa confiance en elle qu’elle ne trouva jamais. Le couple s’étiole sous les yeux de Jane (Thora Birch), l’enfant unique de la famille, qui trouve refuge chez son voisin Ricky Fitts (Wes Bentley) ayant récemment emménagé avec ses parents, et passant ses journées à tenter de capter l’insondable qui l’entoure avec sa caméra quand il ne revend pas de drogue et qu’il ne se fait pas tabasser par son père (Chris Cooper).
Quel est l’élément perturbateur déclenchant l’intrigue ? À vrai dire, il y en a plusieurs comme il pourrait n’y en avoir aucun. American beauty est un film jouant sur la banalité de l’existence de Monsieur Tout-le-monde, sur ses problématiques qui n’en sont finalement pas et qui pourtant lui pourrissent son quotidien… Jusqu’à son réveil.
Ce réveil est incarné par Lester Burnham faisant le choix de se détourner de ses masturbations matinales quotidiennes, de son éthique professionnelle, des infidélités de son épouse, pour se dédier totalement à ses aspirations les plus profondes. De nouvelles connexions se créent et mènent Lester sur un chemin inconnu délivrant sa férocité de vivre. Au milieu de ses souvenirs et de ses espoirs de devenir enfin l’homme qu’il aurait dû être depuis toujours, les rênes de sa nouvelle monture lui échappent : il n’apprit jamais à la dompter.
Puis on s’est séparés
Long-métrage aux cinq Oscars récompensé également dans les plus prestigieux festivals mondiaux, notamment à Cannes lors de la vingt-sixième cérémonie de 2001, American beauty est avant tout l’histoire d’une évidence simple, celle du tourbillon de la vie.
Au fil des notes composées par Thomas Newman pour la bande originale du film, le scénario d’Alan Ball libère toutes ses nuances corsées grâce à la maîtrise et à la sensibilité de Sam Mendès. Le casting est sans doute l’un des plus harmonieux dans toute l’histoire du cinéma international : son brio s’exprime en un regard, la connivence des acteurs en un silence.
En arriver là
L’interprétation magistrale de Kevin Spacey et le destin de son personnage émeuvent : la vérité nous saute à la gorge puis enfonce ses mains dans notre poitrine. Elle malmène notre cœur après avoir complètement ouvert notre cage thoracique. Elle finit par prendre une infime part de notre âme, à jamais pétale d’une rose nous étant finalement rendue.
Comment pourrez-vous alors justifier que vous l’ayez à nouveau perdue ?