Mercredi sortait le premier film écrit et réalisé par Sébastien Marnier, Irréprochable. Axé sur la lutte d’une femme profondément atteinte et masquant quotidiennement sa détresse aux autres, il est également l’occasion pour Marina Foïs de démontrer un peu plus encore son grand talent : celui d’incarner sans imiter.
Constance (Marina Foïs) est agent immobilier sur Paris. La première séquence nous fait partager son réveil. Celui dans la chambre d’un appartement qui n’est pas le sien. Celui dans sa vie, mais produira-t-il les effets escomptés ? Rien n’est moins sûr. Constance a perdu son travail. Elle n’a plus de logement. Elle décide donc de retourner dans sa ville natale. Dans le train qui l’y conduit, elle croise Gilles (Benjamin Biolay) avec lequel elle couche une fois le train arrivé en gare. Leurs ébats révèlent un abandon éphémère d’elle-même, son désespoir patent.
La revoilà dans la maison de son enfance, assise à la table de la cuisine l’air hagard. Sa mère est à l’hôpital. Son père n’est même pas évoqué. Elle est seule et son unique souhait apparent est de retrouver son ancien travail, celui qu’elle avait il y a quelques années dans une agence du coin avant de tenter sa chance à la capitale. Au volant d’une voiture sans âge, la voilà le lendemain matin en face de son ancien directeur (Jean-Luc Vincent) pour défendre sa cause.
Puis en face de son ancien collègue Philippe (Jérémie Elkaïm) toujours en poste, toujours bercé par les souvenirs de sa relation il y a six ans avec elle. Désormais marié et père de famille, il va tenter d’aider son ancien amour à récupérer son poste. En vain puisque c’est une jeune indépendante (Joséphine Japy) qui sera finalement embauchée à sa place.
Irréprochable : double je et néant sous la table
Irréprochable n’est pas un long-métrage très commun. La cohérence de l’histoire, tout comme ses aspects les plus déroutants, tiennent à une écriture qui déshabille les personnages avec un œil qui est lui-même perdu. Ce regard est celui de Constance, une femme qui pourrait effectivement exister dans la vraie vie sans jamais occuper la rubrique des faits divers tant son habileté à demeurer lisse est devenue chez elle une seconde nature.
On cerne ainsi aisément l’évidence du choix de Sébastien Marnier : Marina Foïs porte le rôle et le film de façon exemplaire. Sa faculté à caractériser l’imprévisible épate et émeut. Avec même le sentiment d’assister à la naissance d’une grande actrice. Irréprochable est donc un film à voir. Car même s’il manque de ces détails accentuant les relations interpersonnelles, le passé des personnages et l’intrigue, il a le mérite de créer la surprise et de confronter chacun à sa condition d’être, nu sur un carrelage froid, les yeux rivés au plafond, reflet de cette part de vide qui l’habite.