Ils sont trois, tous originaires de Bordeaux, et ils ont faim. S’ils exposent leur premier EP Better!Better!Better! dans les rayonnages de la boucherie de leur grande surface préférée, Sam Barbier, Denis Dedieu et Silvio Giraldou sont surtout les composantes de Daisy Mortem, ses visages angéliques croisant le fer avec des reptiles venus d’un autre temps, et avec ceux bien d’aujourd’hui rampant dans les rues de leur lotissement jusqu’à leur chambre à coucher.
Daisy Mortem : un univers dans lequel les gourous se font appeler maîtres de conférences. Dans lequel les collaborations artistiques deviennent des réunions déjantées où les cotillons remplacent avantageusement les effets spéciaux, et où trois fanfarons se baladent à poil couverts de farine, en réussissant à ne point se couvrir de ridicule, bien au contraire. Daisy Mortem : voilà un tout jeune groupe alternatif qui risque de faire parler de lui. Il le peut, et c’est en partie déjà le cas suite au lancement aujourd’hui de son premier EP Better!Better!Better!
La légende veut que Sam Barbier et Denis Dedieu aient d’abord tenté d’invoquer les esprits de manière traditionnelle. Et ce, avec une simple table de Ouija. Alors voisins de palier, leurs appels à cet au-delà original issu d’une fertile imagination a pour principale conséquence l’apparition à leurs côtés d’un claviériste, Silvio Giraldou, tout autant inspiré par la musique gothique et industrielle qu’eux.
Daisy Mortem : possession électro
Depuis longtemps, l’exorcisme n’a plus aucun effet sur Daisy Mortem, cette belle blonde translucide qui rendait déjà visite à Silvio Giraldou lorsqu’il venait faire sa promenade quotidienne dans le cimetière situé en face de chez lui. Daisy Mortem hante désormais ses trois adorateurs jusqu’à leur imposer son nom. Ils sont sous sa coupe et ne s’en cachent pas. Mieux, ils lui dédient une chanson d’amour tirant les ficelles d’un sentimentalisme remis au goût du jour dans I Love U. Dans son clip, l’apparition fantomatique devient l’aventure de ces deux « pregnant males » brouillant les frontières du genre et de la sexualité.
Il faut le voir pour le croire. Et il faut les lire pour comprendre. Et Daisy Mortem se fait une joie de manipuler l’anomalie dont tous les trois se réclament, « faite de « bugs » et de déviations, futuriste et rétro en même temps, comme ces acteurs de Films911 au look hyper aseptisé dont les pratiques sexuelles touchent à la science-fiction ».
Minimalisme à tous les étages, et ça cause
Avec Better!Better!Better! Daisy Mortem s’éclate et rend hommage. Sa collaboration avec Dallas, un autre groupe bordelais versé quant à lui dans la sorcellerie des strip-teaseuses et la magnificence des vieux losers, donnait déjà le ton dans ce sens. Et ce premier jet d’esprit, de dérision et de sonorités tout autant ironiques qu’oniriques fait la part belle à des influences musicales complètement décousues que Daisy Mortem se réapproprie à grands coups de synthé et de rythmes punk trip-hop à la « Bonjour et bienvenue sur la plateforme téléphonique de votre service client » dont Sam Barbier sait jouer dans le titre EP Better!Better!Better! comme il en vécut passé un temps.
Everyone does it. Mais qu’attendre alors de cette folie complètement instrumentalisée par Daisy Mortem ? Folie passagère ou durable ? Le dernier titre clipé du groupe, Ways, dévoile une proposition artistique contemporaine. Celle-ci semble ne faire aucun effort pour exister entre les mains de ses membres. Ceci dit, l’avenir dresse un magistral point d’interrogation doublé d’un doigt de l’honneur et non d’honneur. Un avenir « où les limites du corps humain peuvent constamment être repoussées ». Où les hommes envoient des textos aux spectres de leur entourage sans sourciller. Où l’on se fout de l’imprévisible pour faire la part belle à l’instant apte à changer la conjecture attachée à Daisy Mortem en réalité.
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