Sorti en 2014, Predestination est un film de science-fiction réalisé par les jumeaux australiens Michael et Peter Spierig (Undead, Daybreakers). Adapté de la nouvelle de Robert A. Heinlein, All you Zombies, il conte la vie d’un être à part se suffisant à lui-même par bien des aspects, voué à revivre inlassablement et méthodiquement le même parcours de vie.
L’explosion a été évitée de justesse, mais elle ne l’a pas laissé indemne : son visage est complètement brûlé. Et cet autre qui s’approche ne laisse transparaître aucune de ses intentions. Au milieu des flammes, celui-ci finit par l’aider à récupérer son coffret de violon. Voici le héros couvert de bandages. Seuls ses yeux côtoient la lumière du néon de sa chambre. Un espace médicalisé dans lequel le temps semble s’être suspendu. L’agence gouvernementale est dans les lieux : remise de médaille, nouvelle mission à venir, convalescence.
La reconstruction du visage est complète : l’homme (Ethan Hawke) se reconnaît à peine. Le voilà reparti pour de nouvelles aventures. Derrière un bar, au service de ses piliers. Jusqu’à l’arrivée de cet homme (Sarah Snook) qui détone. Jusqu’à ces premiers échanges, jusqu’à ce pari et l’histoire d’une vie. La surprise n’est pas feinte lorsqu’il commence son récit. « Lorsque j’étais petite fille ». À moins qu’elle ne le soit…
Dédoublement pour une unité
Il s’agit là de l’ADN du film. Ainsi, on dit souvent que les vrais jumeaux ne forment qu’une seule et même personne : les frères Spierig étaient les seuls à pouvoir adapter et réaliser Predistination.
Pour ceux qui ne l’ont jamais vu, ce long-métrage offre une panoplie de rebondissements saisissants qui savent tenir en haleine. Et pour les autres, Predestination se fait scruter dans les moindres détails pour capturer l’instant d’une existence. Histoire de comprendre enfin, si cela est vraiment possible, qui de l’œuf ou de la poule est arrivé le premier.
Intrigues, indices et évidences
La talentueuse comédienne australienne Sarah Snook occupe pas moins de trois rôles, déformant les codes et transgressant les barrières entre les genres, les émotions et les sens. La toute première rencontre de son personnage, Jane, avec le spectateur, se fait elle-aussi dans l’anonymat le plus total.
Jane, ou la femme qui en est effectivement une. Mais qui au fil des séquences révèle toute la complexité de sa nature qu’elle ne doit finalement qu’à elle-même. À lui également. Au seul tiers du dehors enfin, agissant dans l’ombre de l’agence gouvernementale chargée de préserver la boucle.
Un éternel recommencement
Prix du public en 2014 au festival international de la science-fiction Utopiales, Predestination fait partie de ces films usant de l’anticipation pour évoquer avec justesse les remous de l’âme humaine. Avec sensibilité, sa fragilité.
Les frères Spierig réussissent à recréer le lien si particulier les unissant à travers le duo formé par Ethan Hawke et Sarah Snook. Une paire qui accède à une unité physique et psychologique afin de matérialiser celle que chacun d’entre nous compose avec l’infinité du temps.