Tous les chemins mènent au cinéma ! Ce n’est pas Rupert Sanders qui dira le contraire. Le réalisateur britannique, qui a fait ses classes dans le monde de la pub, revient cette semaine avec une nouvelle adaptation. Après celle de Blanche-Neige en 2012, c’est au tour du manga culte Ghost in the Shell de passer entre ses mains. Le film sort aujourd’hui dans les salles. Il met en scène une Scarlett Johansson au sommet de sa forme, au cœur d’une aventure originale mêlant suspens, thriller et science-fiction.
Les bras mécaniques d’une technologie dernier cri porte le cerveau d’une jeune femme inconnue. Il vient d’être retiré du crâne de son corps de chair et de sang. Son nouvel habitat sera celui d’une machine dont le squelette inerte attend déjà à côté. L’expérience est décrite comme la première du genre. Elle s’inscrit dans l’évolution d’un monde où les trois quarts de l’humanité sont désormais équipés d’implants cybernétiques. Et ce, afin d’accroître leurs différentes capacités. Vision nocturne, bras en métal, phalanges articulées… Le monde presque entier est désormais hybride et connecté au réseau. Un réseau ou les malwares et les logiciels espions prennent vie et dépassent leur seul état logiciel.
Le Major Kusanagi (Scarlett Johansson) se réveille avec la voix du Docteur Ouelet (Juliette Binoche) dans les oreilles. Son visage est le premier qu’elle voit. À l’instar de celui d’une mère venant de donner naissance à son enfant. Après les premières secousses d’un corps qu’elle n’identifie pas encore, on retrouve Le Major un an plus tard au sommet d’un building surplombant une ville. Des hologrammes géants tutoient le ciel. Le Major est en mission spéciale pour la section 9, une unité d’élite gouvernementale. Elle se jette dans le vide afin de poursuivre sa traque pour laquelle elle fut conçue.
En filigrane, ses questions quant à sa part d’humanité, quant à son « ghost ». Autrement dit son âme. Ses questions quant aux souvenirs qui lui appartiennent vraiment. Quant à sa place dans une société dont elle se sent constamment déconnectée. Sa rencontre avec Kuze (Michael Pitt) va tout bouleversé. Qui sont en définitive ses véritables ennemis ?
Ghost in the Shell : la science-fiction a ses limites
Ghost in the Shell est un manga de Masamune Shirow publié pour la première fois au Japon en 1989. Deux nouveaux épisodes sortirent deux et huit ans plus tard. On ne compte plus ses adaptations notamment pour le jeu vidéo, ni les nombreuses séries dont il est à l’origine. Si le monde anticipé par Masamune Shirow il y a presque trente ans est encore loin d’être une réalité aujourd’hui sur le plan technologique et scientifique, il existe en revanche bel et bien quant à l’évolution des mentalités et le contexte sociétal internationale de 2017.
À la croisée d’autres productions cinématographiques d’envergure telles que Matrix, I, Robot et A.I. Intelligence artificielle, l’adaptation de Ghost in the Shell made by Rupert Sanders conserve l’aspect poétique du manga tout en réécrivant son histoire. Celle-ci devient bien moins complexe, plus accessible. Ses enseignements vont au-delà des clichés du genre. Et pour cause…
Des actes au présent qui nous définissent
Voici donc celui autour duquel s’articule tous les autres. Car si la mémoire peut défaillir, car si l’individu peut être poussé à réécrire sa propre histoire pour faire face aux obstacles tout en conservant une certaine part de nostalgie ainsi que des regrets, c’est chaque jour que tout se joue. Lui faut-il pour autant ne compter que sur la technologie pour mener sa quête à bien ? Sachant que la technologie n’est en l’espèce qu’un prétexte, une métaphore de ce qui est extérieur à l’individu, de ce qui ne relève pas de ses propres aptitudes à développer de lui-même ses propres atouts.
Dans un monde où la responsabilité individuelle n’a jamais été aussi déterminante, non seulement pour l’individu lui-même mais aussi pour la société toute entière, le film Ghost in the Shell offre une perspective et une réflexion qui méritent une attention particulière. La finalité ? Sans doute remettre les choses à l’endroit, définir un amont de l’évolution plus cohérent, plus porteur, moins fragile. Sans doute permettre à chacun de révéler l’inconscient qui sommeille et dont l’expression concrète tiendrait à sa toute première capacité : celle de projection pour, à travers l’autre, et en tout premier lieu, lui-même.