Marie-Francine est le nouveau film réalisé, interprété, écrit, ressenti, pensé toute la journée de Valérie Lemercier : il sortira mercredi. Si la promo assurée par l’artiste et son compère Patrick Timsit ses dernières semaines dans les médias révèle déjà de petits moments rarissimes, le film Marie-Francine va plus loin et offre lui aussi ses moments déjà cultes, entre bonne tranche de rire et réflexion juste sur la société d’aujourd’hui et sur la vie.
Vingt ans, rendons-nous compte ! Voilà vingt printemps que le premier film réalisé par Valérie Lemercier, Quadrille, vit le jour sur la grande toile. À l’époque, l’actrice était bien plus connue que la réalisatrice. Quant à la femme, elle resta toujours sur la réserve lorsqu’il s’agissait de se dévoiler un peu. C’est sa folie qui prit alors le dessus. Nul doute que la drôlissime et élégante comique gardera la main jusqu’à la fin. De fin, il en est justement question dans le nouveau film de la Dieppoise. Non, pas comme on pourrait l’anticiper. Plutôt comme une réalité qui s’impose mais qui n’aura pas le fin mot de l’histoire. La victime est donc Marie-Francine. Elle est scientifique, elle est cartésienne, elle rêve en secret. Elle est aussi trompée, laissée pour compte et infantilisée.
Retourner chez ses parents à cinquante piges, quoi de plus déroutant. La vie de Marie-Francine devient une longue succession d’épisodes qui se ressemblent tous mais qui, bien entendu, ne lui ressemblent en rien. Marie-Francine se laisse guider par les choix de ses parents pour elle-même. Par les évènements. Par la facilité et cède pour la première fois à la clope. Et puis regardez comme elle se fringue ! Le contre-modèle d’elle-même est plus fort que jamais sans le revendiquer ouvertement. Il est sa sœur jumelle, rôle que Valérie Lemercier se fait évidemment un bonheur d’interpréter également. Ça se bouscule, ça tiraille, ça déchire. Jusqu’à une rencontre. La rencontre. Celle avec Miguel (Patrick Timsit). Dont on avait pensé qu’elle n’existerait pas. Jamais. Pour toujours. Jusqu’au zeste d’un citron portant son numéro puis aux deux fers en l’air dans la poubelle pour en récupérer les restes.
Marie-Francine : so Fresh, so Frenchy
Avec Marie-Francine, Valérie Lemercier frappe juste. D’une part, dans l’écriture et la mise en scène. Il y a du monde dans sa caboche, tout son public désormais le sait. Il y en a donc également plusieurs dans celle de ses personnages.
À coup de souvenirs cinématographiques et médiatiques, Valérie Lemercier a la plume joueuse, se souvient et fait revivre la grande bourgeoise parisienne faisant face à Monsieur Ouille, the black Agathe, les soirées Palace, les soirées baise avec Kad et Olivier, les plus Nuls aussi.
En renfort, les chansons, et surtout, les textes des chansons de sa jeunesse. De Moustaki à Sylvie en passant par Julio et Nana, les mots d’hier en trouvent à leur tour une nouvelle. C’est dansant, c’est symbolique, c’est synonyme, c’est émotion. Toujours avec légèreté et une pointe de frivolité.
Dans les pas d’acteurs qui n’en sont plus
Voilà la seconde réussite de Marie-Francine. Le casting du film est dans la vraie vie, sans un chichi, sans un faux-semblant. Les contextes, les situations, les parcours de chaque personnage sont dans la vraie vie. On n’omet aucune imprécision liée à l’entre-soi. On est entre les autres, sans oublier que l’on en fait nous aussi partie. Là est la vraie force de Valérie Lemercier.
Alors, entre l’hilarité suscitée par Hélène Vincent et Philippe Laudenbach et l’exceptionnelle sincérité de Patrick Timsit qu’on (re)découvre en restaurateur un peu bourru lui aussi condamné au logis parental, Valérie Lemercier s’amuse et ça se sent. Et c’est bien là ce soupçon de quelque chose qui manque parfois tant au cinéma français.