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The Pirouettes | Promenade au cœur d’un nuage de coton

THE PIROUETTES

Le premier janvier dernier, le duo The Pirouettes a sorti son tout dernier single intitulé 2016 – En ce temps-là. Le choix du titre révèle une perspective anachronique de cette nouvelle année. Ainsi qu’une capacité de projection hors-norme de ses auteurs. De quoi permettre au projet d’insuffler au rock alternatif made in France un véritable renouveau émotionnel. Celui-ci fait écho aux débuts de leurs aînés les plus talentueux.

Bonjour Léo. Et tout d’abord, bon anniversaire ! Tu le fêtais le 8 janvier dernier. Ça te fait quel âge aujourd’hui ?

Léo Bear Creek : Merci ! The Pirouettes l’a fêté comme il se devait. C’est cool parce que plus ça va, plus mon anniversaire dure longtemps (rires). J’ai eu vingt-trois ans.

Nous allons évoquer avec toi la sortie du dernier single de ton duo The Pirouettes, intitulé 2016 – En ce temps-là. Tu as formé ce projet en 2013 avec ta Vickie Chérie. Tu n’en es pas à ton coup d’essai. En effet, tu fais partie, depuis plus de dix ans, du groupe Coming Soon. De the Escort, votre premier EP sorti en 2007 à votre premier album New Grids paru un an plus tard, sans oublier votre dernier EP Sun gets in sorti en septembre dernier, je suis un fan absolu. Tu avais seulement une dizaine d’années lorsque tu t’es lancé dans ce projet musical en tant que batteur du groupe. Mais aussi en tant qu’auteur et interprète. Tu chantes notamment le génialissime Big Boy, ainsi que le titre Vampire faisant partie de la BO du film Juno. On ne compte plus vos collaborations d’exception : the Moldy Peaches via le groupe antifolk Antsy Pants, Stanley Brinks, Olivia Ruiz, Etienne Daho, Bruno Geslin… Et sinon, quel temps fait-il à Annecy en ce moment ?

Léo Bear Creek : (rires) Actuellement, je ne suis pas à Annecy car j’habite à Paris depuis que j’ai passé mon bac. Je crois qu’il y fait le même temps qu’ici, gris-gris.

J’ai remarqué que le dernier clip de Coming Soon pour votre titre Waves avait été tourné sur le lac d’Annecy. C’était quand ? Quel souvenir en gardes-tu ?

Léo Bear Creek : C’était en août dernier. Il s’agissait juste d’une après-midi sympa entre potes. Nous disposons d’un bateau là où nous répétons. Du coup, nous en avons profité pour faire une petite balade. Nous avions embarqué la caméra avec nous. À la fin de ce tournage improvisé, nous nous sommes dit que nous pouvions en faire un clip.

Comment le gamin de dix ans que tu étais au moment de lancer Coming Soon considérerait-il l’artiste et l’homme que tu es aujourd’hui ?

Léo Bear Creek : Je pense qu’il dirait : « Mec, t’es vraiment à la traîne ! » C’est un peu ce que je me dis aussi. Comme tu l’as si bien rappelé, ça fait un moment que je fais de la musique. Il serait temps que ça passe au niveau supérieur. Que ça marche pour de bon. Quoiqu’il en soit, ce gamin kifferait la musique que je fais, que nous faisons.

Qu’attends-tu de plus ? Une plus grande notoriété ? Des tournées à l’étranger ?

Léo Bear Creek : Complètement. J’adorerais qu’on joue plus à l’extérieur, tant avec Coming Soon qu’avec The Pirouettes. Et puis j’ai aussi envie de faire beaucoup d’argent avec la musique. Pourquoi pas un disque d’or ? (rires) Notre musique est pour l’instant très indé et je n’ai rien contre. J’aimerais simplement qu’elle touche un maximum de gens. Plus ils sont nombreux à écouter notre musique, plus c’est beau.

Qui est Howard Hugues ? Quel a été son rôle dans la création de Coming Soon, son développement, sa réalisation complète, ainsi que dans ses collaborations que j’évoquais tout à l’heure ?

Léo Bear Creek : Howard est le membre le plus « sage » de Coming Soon. Le plus âgé quoi (rires). Même s’il n’est pas si vieux que ça, puisqu’il a aujourd’hui un peu plus de la trentaine. Il est le frère de Billy, le bassiste du groupe. En fait, deux fratries composent Coming soon : Ben et moi, Howard et Billy. Sans oublier Alex bien sûr. Howard a joué un rôle majeur depuis la création du groupe. Il en est un membre moteur. Quand Coming Soon a débuté, il a très vite été aussi notre coach linguistique. Sa mère était prof d’anglais. Du coup, il nous accompagnait pour que nous ayons une prononciation irréprochable. Mais concernant les collaborations que tu as citées, et notamment celle avec the Moldy Peaches, la rencontre avec Kimya Dawson est bien plus fortuite que ça.

Tu peux nous en dire plus ?

Léo Bear Creek : Il se trouve qu’elle était venue faire un concert à Annecy. Elle avait entamé une relation avec l’organisateur de ce concert, qui se trouvait être un très bon ami à nous. Du coup, elle était restée un peu plus longtemps que prévu sur Annecy. Nous en avons profité pour enregistrer un album avec elle. À l’époque, nous avions trouvé ça fun de le produire avec un autre nom de groupe, Antsy Pants. Avec le recul, je pense qu’on avait pris la mauvaise décision. En effet, la notoriété du film aurait pu nous apporter bien plus si nous avions signé avec notre nom à nous. Une autre collaboration qui m’a marqué est celle avec Étienne Daho. C’est lui qui est venu vers nous la première fois. Nous sommes devenus potes. C’est une personne adorable. J’ai rarement rencontré quelqu’un d’aussi gentil que lui. Nous avons repris un morceau de Coming Soon avec lui, Private Tortures, pour un DVD live sorti il y a quelques années. Il continue à nous suivre encore aujourd’hui. Non seulement avec Coming Soon mais aussi avec tous nos projets parallèles.

the pirouettes

Revenons à The Pirouettes, le duo que tu formes avec Vickie Chérie. Et ce, depuis votre rencontre sur les bancs de votre lycée et le début de votre love story. En 2013, vous sortez votre premier EP éponyme. Il inclut notamment votre single Danser dans les boîtes de nuit. Votre marque de fabrique, c’est ce synthé qui croise une pop minimaliste aux rythmes entêtants. Ainsi que des textes explicites décrivant des pensées ressenties par votre couple et de nombreux autres. Mais aussi des situations de la vie quotidienne sur lesquelles vous vous interrogez sans détour. Finalement, The Pirouettes ne serait-il pas ta grande récré aux côtés de celle que tu aimes, une fois que sonne la sortie de la classe de Coming Soon ?

Léo Bear Creek : C’est exactement ça, c’est vraiment comme ça que ça a commencé. Depuis ses débuts, Coming Soon a des projets complémentaires parallèles à celui considéré comme le principal. À un moment donné, je m’ennuyais un peu. J’ai commencé à écrire des chansons, d’abord en anglais. C’est d’ailleurs ainsi que j’ai réussi à séduire Vickie. Dès que nous avons été ensemble, elle et moi avons poursuivi cette écriture, avec de plus en plus de chansons en français.

Ce contrepied d’écrire en français était-il voulu dès le départ ? Avait-il un rapport avec les textes anglais de Coming Soon ?

Léo Bear Creek : Ce n’était pas voulu, c’est venu progressivement en fait. Nous avons pris conscience que le français nous allait bien. Il ne s’agissait pas de faire la différence de façon radicale avec Coming Soon. Plutôt d’un choix assumé et de notre envie commune. Un amour des textes français, né à la suite de notre reprise d’un titre de France Gall et de Michel Berger.

Nous y reviendrons tout à l’heure. Au-delà de votre amour, au-delà de votre affection commune pour les années 80, des paroles de vos chansons, quel est le message de the Pirouettes ?

Léo Bear Creek : Je n’aime pas trop que l’on nous colle les années 80 en permanence en fait. C’est sûr qu’on peut ressentir des influences et des sonorités propres à cette époque à travers les synthés et les boîtes à rythme. Mais ce n’est clairement pas la musique autour de laquelle nous nous sommes retrouvés Vickie et moi.

Pourtant Léo, j’ai retrouvé certaines de vos précédentes interviews dans lesquelles Vickie et toi exprimiez votre regret de ne pas être nés à cette époque…

Léo Bear Creek : C’est clair. Mais la vérité, c’est que nous avons commencé à nous intéresser à cette période au moment où les gens nous l’ont justement collée à la peau. Quoiqu’il en soit, je peux comprendre le rapprochement, même s’il n’était pas voulu de notre côté.

Quelles sont les réelles intentions de The Pirouettes alors ?

Léo Bear Creek : Nous faisons de la musique en couple pour nous faire plaisir. Il n’y a aucun message politique dans notre démarche. Nous ne faisons pas de la musique engagée. Nous essayons juste de toucher les gens pour qu’ils puissent se reconnaître dans notre univers et passer un bon moment. C’est notre principale ambition.

« Aujourd’hui, j’ai l’impression que ce serait perçu comme un peu ringard d’aborder les mêmes thèmes universels que Michel Berger. Sans doute cela marchait-il bien à l’époque. Mais je trouve qu’il y a quelque chose de plus superficiel de nos jours. Peut-être que je me trompe… »

 

Si votre duo dispose d’une identité qui lui est propre, votre musique m’a tout de même renvoyé plus de vingt ans en arrière. Comment ? Si je te dis Catherine Diran, Benoît Carré, à quoi cela te fait-il penser ?

Léo Bear Creek : À rien du tout, j’ignore qui ils sont.

Il s’agissait du duo Lilicub, devenu assez connu en 1994 avec leur tube Voyage en Italie. Ça te parle ?

Léo Bear Creek : À oui en effet, je me souviens maintenant. On nous en avait déjà parlé de ce groupe. Nous avions d’ailleurs écouté quelques uns de leurs titres à cette occasion. Mais n’oublie pas que je n’avais qu’un an en 1994 !

(rires) Tu parlais tout à l’heure de Michel Berger et de France Gall. Comment expliques-tu cet attachement à leur image et à leur œuvre que vous ressentez Vickie et toi, et que vous avez d’ailleurs concrétisé par une reprise de leur titre Comment lui dire ?

Léo Bear Creek : Nous les adorons en effet. Ils ont fait de purs morceaux. Michel Berger était une machine à faire des tubes. C’est impressionnant tout de même de voir le nombre de hits qu’il a réussi à faire dans toute sa carrière. Et puis, je suis personnellement très touché par son écriture à la fois simple et profonde. Je pense qu’il arrive à parler au plus grand nombre tout en conservant cette profondeur. Ses messages sont forts. Quant à France Gall, c’est un peu l’interprète rêvée. Tout ce qu’elle a fait, peu importe la période. J’aime beaucoup sa voix.

Il y a sa voix en effet. Il y a aussi une « époque musicale » empreinte de cette profondeur simple que tu évoques. Es-tu en quête de cette gravité ? Penses-tu l’avoir déjà atteinte avec The Pirouettes ?

Léo Bear Creek : Je n’en suis pas certain. J’aimerais réussir à le faire. Mais je n’ai jamais égalé le talent de Michel Berger et je ne sais pas si cela se produira un jour. En parallèle, nous ne vivons pas dans la même époque que Michel Berger et France Gall. Aujourd’hui, j’ai l’impression que ce serait perçu comme un peu ringard d’aborder les mêmes thèmes universels que Michel Berger. Sans doute cela marchait-il bien à l’époque. Mais je trouve qu’il y a quelque chose de plus superficiel de nos jours. Peut-être que je me trompe…

Le rôle d’un groupe comme The Pirouettes ne serait-il pas justement de contourner cette superficialité pour évoquer à nouveau en chanson des thèmes qui parlent à tous ?

Léo Bear Creek : C’est un peu notre perspective. J’ignore si nous allons y parvenir. Mais effectivement, c’est quelque chose que nous aimerions bien faire.

J’ai remarqué dans vos précédentes interviews que Vickie et toi aviez du mal avec certaines critiques. Notamment celles qui qualifient votre musique de simpliste et de naïve. Qui ne le serait pas ? Ma question concerne plutôt le pourquoi de ce malaise. Est-ce la nature même de ces critiques qui vous déplaît ? Ou est-ce plutôt le fait qu’elles vous renvoient à votre précocité artistique et musicale ?

Léo Bear Creek : Cela ne concerne pas notre précocité, car nous sommes finalement fiers d’être jeunes. Nous avons plutôt peur de vieillir. C’est pour cette raison que nous souhaiterions que les choses aillent plus vite ! Quoiqu’il en soit, la naïveté est souvent associée à la niaiserie. C’est là que ça devient un peu péjoratif. En même temps, je n’ai rien contre le fait que ma musique soit qualifiée ainsi. Si cela signifie que je suis dans ma bulle, que je suis un illuminé, après tout, pourquoi pas ?

Es-tu personnellement dans cet élan de devoir te justifier encore aujourd’hui de ta maturité avant l’âge, que l’on ressentait déjà énormément dans le clip de Coming Soon de 2008 du titre Big Boy ?

Léo Bear Creek : Je n’ai pas eu et je n’ai pas l’impression de faire une musique plus mature que celles faites par d’autres personnes de mon âge. Au contraire, je trouve qu’elle correspond complètement à mes vingt-trois ans. Je n’ai pas eu et je n’ai pas non plus l’impression d’être en avance. Peut-être qu’au moment de chanter Big Boy il y a quelques années, et alors que je n’avais que quatorze ans, j’aurais pu me considérer ainsi. Mais aujourd’hui, je suis bien dans mon temps. Je suis bien au milieu de tous ces autres artistes de mon âge.

the pirouettes live

2016 – En ce temps-là est donc sorti le lendemain de la Saint-Sylvestre 2015. Tu reviens avec Vickie sur votre rencontre, comme vous l’aviez déjà fait auparavant. Notamment dans votre titre Chanter sous les cocotiers en 2014. Vous vous projetez également dans votre avenir commun. Je sais que votre prochain album est en cours de finalisation. Quels autres thèmes, en-dehors de vous, avez-vous prévu d’évoquer dans vos autres nouvelles compositions ?

Léo Bear Creek : Je ne vais pas te les révéler car ils feront partis de notre prochain premier album. Mais nous avons bien conscience que nous ne pourrons pas parler indéfiniment de notre couple dans nos morceaux. Même si beaucoup de gens peuvent s’identifier à ces paroles, même si beaucoup d’artistes parlent d’eux dans leurs musiques, il faudra que nous apportions de la diversité à nos textes.

Quel regard portes-tu sur les évènements dramatiques qui ont eu lieu à Paris en janvier et en novembre 2015 ? The Pirouettes chanteront-ils cette actualité dans leurs prochains morceaux ?

Léo Bear Creek : Ces évènements nous ont bouleversés Vickie et moi. Profondément. En même temps, je ne crois pas que nous aborderons ce type de sujet qui nécessite une certaine subtilité, notamment dans l’écriture, pour être vraiment compris.

Le moment est venu pour la question qui fâche. C’est une chose que l’on ne vous souhaite pas, bien sûr, mais qu’adviendra-t-il de The Pirouettes si vous vous séparez Vickie et toi ?

Léo Bear Creek : Pour tout te dire, si malheureusement cela devait arriver, nous nous sommes dit que nous continuerions malgré tout à faire de la musique ensemble à l’instar de The Do. Le duo a sorti l’année dernière Shake Shook Shaken. C’est leur meilleur album selon moi. Et pourtant, sa sortie suivait sa rupture. Du coup, je pense que nous pourrons Vickie et moi surmonter nos problèmes personnels pour continuer à faire de la musique ensemble. Même si ça ne doit pas être une expérience facile à vivre.

Dernière question en rapport avec le prochain single et le premier album de The Pirouettes : comment s’intituleront-ils ? Quels seront les sujets abordés ?

Léo Bear Creek : Je ne sais pas encore quel sera le prochain extrait de notre prochain album. Je n’ai pas de date de sortie à te communiquer actuellement. Nous retournons en studios en février pour compléter cet album de certains morceaux que nous finalisons en ce moment. En fait, nous aurions pu passer par la case EP comme précédemment. Mais nous avons vraiment envie de faire ce premier album cette fois-ci !

 


The Pirouettes : Facebook | Crédits photos : Élodie Gouillier (header)

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