Sorti dans les salles le 15 novembre 2017, soit quatre ans après Les Garçons et Guillaume à table, Maryline est une ode aux blessures qui ne se referment jamais. Ce long-métrage écrit, réalisé et coproduit par Guillaume Gallienne confère à ce dernier l’aura du sensible sachant manier la subtilité, évitant à cette occasion de tomber dans le piège de la caricature et dans celui de la sensiblerie. Un vrai bijou.
Maryline (Adeline d’Hermy) veut devenir comédienne. Après avoir dispersé les cendres de son père dans l’un des champs de sa campagne natale, elle part à Paris. Elle laisse derrière elle un passé que, dès lors, elle décide de taire. Un passé dans lequel le père qui la regardait jadis monter sur scène pour recevoir un prix de bonne conduite, répond à celui qui décida finalement de se pendre.
Sa première grande expérience de tournage se déroule mal. Malmenée par un réalisateur trop inspiré pour l’être vraiment, elle tourne le dos à son petit rôle pour rentrer chez elle à travers prés. Un appartement parisien sans prétention qui devient rapidement un simple dortoir où se dépose sur le sol la lie de ses vomissements à répétition. Au mur, les poussières de l’ombre d’elle-même.
Maryline a soif, elle boit plus que de raison sans se rendre compte que ces basses liqueurs ne résoudront rien. Elle se gave d’illusions, d’angoisses et d’excès pour combler l’absence. Celle de l’amour, de la liberté. Celle d’une Maryline que le cruel manque de confiance en elle pourrait achever. Jusqu’où poussera-t-elle son martyr ? Finira-t-elle par abdiquer ?
D’une banalité pleine de sens
Lors du visionnage de la bande-annonce du film, on prie pour que la promesse ne soit pas fausse. Puis arrivent les premières minutes, les premières images. Et la séquence dans ce bar de village paumé donne à elle seule le secret d’une extase.
Chaque personnage tient son rôle avec une justesse qui fait mouche. De la buraliste (Florence Viala) à la mère de Maryline (Clothilde Mollet), chaque attitude révèle le souci du détail de Guillaume Gallienne dans les choix qu’il opéra pour la distribution. L’émotion se fait jour dès les premières lueurs de l’aube.
Maryline : au sentiment caché à tous
Le personnage de Maryline étreint la misère de sa vie et embrasse le sourire de son espérance avec la même force. Elle joue à cache-cache avec son destin, au point de risquer de lui faire finalement faux bond. Elle manipule ses nerfs, puis tente vainement de les noyer dans l’alcool. Une belle rencontre avec Jeanne Desmarais (Vanessa Paradis), quelques mots, finissent par la persuader que ce destin-là lui appartient. Que serait la vie sans cette part de hasard qui lui va si bien au teint ?
Avec Maryline, Adeline d’Hermy bouleverse et Guillaume Gallienne sort de l’univers de la Comédie Française, sans doute un peu trop formel parfois. Avec Maryline, et avec talent, ce dernier dit la vérité quant au prix de la liberté. Il responsabilise le spectateur en l’insinuant dans un monde où le quotidien, le cinéma et le théâtre se confondent. De quoi craindre, de quoi perdre le nord. Mais quelle apothéose lorsque TOUTES les lumières se rallument enfin ! De quoi redonner courage, et l’envie de poursuivre l’effort jusqu’à notre véritable destination, celle que les braconniers d’existence avaient toujours cherché à nous dissimuler.