Aujourd’hui sort en salle le dernier long-métrage de Marjane Satrapi, The Voices. La réalisatrice et dessinatrice à l’origine du film animé Persepolis sorti en 2007 nous livre une version très personnelle des effets de la solitude sur l’esprit humain, capable de toutes les omissions pour ne plus en ressentir un seul.
Contrairement aux pilules avalées par Bradley Cooper dans Limitless, optimisant chaque parcelle du cerveau de son personnage afin de le rendre bien plus alerte et intelligent, celles de Jerry – incarné par Ryan Reynolds – dans The Voices produisent l’effet inverse… En quelque sorte.
Il en résulte le même jeu de contrastes et de lumières dans les deux films, à ceci près que dans The Voices, les cachets que Jerry doit ingurgiter sous peine d’être à nouveau interné le plongent dans sa vraie réalité, faite de sombres recoins et de portes ensanglantées.
Ainsi, on pénètre de manière pittoresque dans l’univers des états d’âme du grand gaillard, conversant bien plus naturellement avec ses animaux de compagnie qu’avec ses collègues de boulot.
Jerry est en permanence partagé entre sa bonne et bienveillante conscience représentée par son chien Bosco, et celle lui intimant de laisser sa nature profonde de tueur s’exprimer pour se libérer de ses chaînes.
Diaboliquement mignon, Monsieur Moustache remplit sa mission à la perfection, de quoi faire frémir les amoureux de ces boules de poils aux miaulements ravageurs sur YouTube©.
Film « Almodóvarien » par bien des aspects liés notamment aux dialogues et à la mise en scène, The Voices s’inscrit dans la continuité des séries télévisées récentes telles que Dexter, insinuant dans les veines des tueurs en série des objections et des justifications qui tendraient à rendre admissibles leurs actes auprès du spectateur, aussi horribles et inhumains soient-ils.
Au-delà, il est une réflexion menée en marge sur les rapports humains, l’isolement, le contentement, et la solitude. Ryan Reynolds est méconnaissable dans ce rôle de composition pure. L’intention transcrite dans ses regards dévoile l’infinie tristesse et la profonde détresse du gamin que son personnage ne put jamais être, accablé par les voies impénétrables d’une présence qu’il ne connaîtra jamais et qui dès lors exclut la sienne.
Aussi, si vous n’êtes pas contre quelques éclaboussures, une dérision de façade – seulement – assaisonnée d’une pointe de cynisme et d’un zeste de légèreté revendiquée, enfilez sans hésiter votre bleu de sortie rose bonbon pour visionner cet extraterrestre scénaristique et cinématographique, qui vous laissera sans doute dans la tête cette petite rengaine du bonheur d’un rien.