Après plusieurs années passées dans l’ombre des artistes qu’il accompagnait, Erwann s’est finalement décidé à se poster sur le devant de la scène. Après la sortie d’un premier EP il y a un an, Nouvelle ère, il est revenu en février dernier avec son second : Funambule. Les textes et l’interprétation gagnent en profondeur. Ils invitent à repenser notre rapport aux autres et au temps.
Nombreux sont ses souvenirs connectés à la musique, à l’instar de ces dimanches matin partagés en famille avec sa mère et ses frères à écouter les vinyles de son père. L’émotion le gagne encore à la seule évocation de la chanteuse afro-zouk Monique Séka. Elle côtoie ses toutes premières références personnelles : Corneille, Matt Houston et Craig David.
Entre l’authenticité du premier, la perspective US du second et l’intemporalité des morceaux du dernier, Erwann bâtit sans le savoir son univers musical. À ce moment-là, ses liens avec la musique s’épanouissent derrière sa console. Diplômé de l’institut parisien SAE, il est ingénieur du son. Il finit par écrire ses premiers textes pour d’autres jusqu’à ce que son entourage l’encourage à se lancer en solo.
Erwann : de derrière les manettes à face caméra
Voilà bientôt trois ans qu’il explore ses contrées. Erwann a aujourd’hui 29 ans. Dans ses textes, il ose se livrer à son tour. Son dernier EP Funambule témoigne d’une ouverture nouvelle rimant avec ses toutes premières perspectives créatives attachées au développement d’une approche pop soul rien qu’à lui.
En parallèle, ses nouveaux morceaux révèlent une musique devenue une alliée déterminante dans les moments les plus compliqués de sa vie de famille. “J’ai utilisé la musique pour ne pas péter les plombs”, confie-t-il. “C’était une manière pour moi d’extérioriser. Nouvelle ère était une présentation globale là où Funambule m’a permis de partager mon intimité, celui que je suis, ce que je pense et ce que j’aimerais apporter.”
Sur le fil
Dans Funambule, Erwann creuse et refait le monde. Son écriture et son interprétation imprègnent ses chansons d’une nostalgie qui tutoie le regret. Il y parle de sacrifices : “Je sais que si je tombe, j’y reste.” Mais aussi de cette société où on se jalouse. “J’ai réalisé que les gens voulaient aussi être connectés à des choses bien réelles.”
Montrer qui on est réellement : un objectif véritablement intenable ? “Aujourd’hui, la plupart des gens que je rencontre portent un masque. Ils dissimulent leur personnalité profonde. Ces gens tentent de se fondre dans le décor, de ressembler à tout le monde. C’est un peu le jeu du “je ne me livre pas en premier”. Si je dois me livrer, livre-toi d’abord. Sinon, je ne le ferai jamais.”
Il se révèlera
Erwann pousse sa voix et initie les larmes. “Tant mieux si frappe la foudre” : plus qu’hier, il est habité par le désir de s’éloigner des codes. Aussi considère t’il sa musique comme une mission dépassant le cadre de la création. On le perçoit notamment dans son titre Je nous relèverai en piano voix. “On consomme toujours plus vite, on s’attache moins. Puis on se détache très vite et on recommence très vite, comme par exemple dans les relations amoureuses. Désormais, dès que ça ne va pas dans un couple, c’est fini et on rencontre quelqu’un d’autre.”
“Le soleil se lève, il n’y a plus vraiment de saisons.” Dans le clip de son dernier single Survis sans nous posté le 12 juin, Erwann déambule seul dans un décor rappelant ceux post apocalyptiques de Mad Max : Fury Road et du Livre d’Eli. Une façon pour lui d’user de la perspective cinématographique attachée à cette réalisation pour rappeler également que le temps est précieux. “J’ai l’impression qu’on n’a plus le temps de prendre le temps. Je trouve ça vraiment dommage, ça m’affecte beaucoup. Créer des vrais liens fait pourtant tant de bien au cœur.”
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